Le ministère de la Justice organise la délation
Élisabeth Guigou, ministre de la Justice en France, a demandé aux associations spécialisées dans la lutte contre les sectes de déterrer un plus grand nombre d’affaires.
Par la circulaire aux magistrats et aux juges de France du 1er décembre 1998, le Garde des sceaux présente l’action de la nouvelle mission interministérielle sur les sectes tout en regrettant le manque de plaintes. Il n’y aurait pas assez de dénonciations permettant d’enclencher des poursuites.
Pour pallier à cette carence d’affaires, le ministère de la Justice a chargé les juges de travailler en collaboration plus étroite avec l’ADFI et le CCMM supposés collecter des témoignages à charge.
La liste des symptômes définis par l’AFDI recouvre la plupart des comportements non conformistes et privés : » changement de mode vestimentaire et de régime alimentaire, courrier et appels téléphoniques abondants, sorties et voyages, intérêt pour une cause nouvelle, emprunt d’argent, long temps de lecture et de méditation « … Il est donc conseillé de prévenir l’ADFI ou les renseignements généraux si un de nos proches présente un de ces » symptômes » ou un trait de non conformisme similaire. Les informations ainsi recueillies ont permis de dresser la liste des 172 sectes du rapport parlementaire, bien que des officiers des renseignements généraux estiment qu’une vingtaine de groupes seraient potentiellement sectaires. 150 associations auraient été listées sans aucun délit à charge!
Les pratiques pouvant tomber sous le coup d’un délit de secte : il s’agit de la plupart des méthodes thérapeutiques non conventionnelles comme la naturopathie, le jeûne, la sophrologie, la méditation et les techniques issues du « nouvel âge ». S’y ajoute l’homéopathie, qui serait inefficace….
L’AFDI a également identifié des domaines à risque comme les cours de yoga, la thérapie parentale, les conférences sur les OVNIS et les sujets ésotériques… mais aussi des commerces sensibles comme les librairies spirituelles, les restaurants végétariens et les circuits de produits biologiques.
Comment s’assurer que les plaintes recueillies ne sont pas motivées par l’intolérance, les préjugés ou la malveillance? Cette question n’a pas été débattue.
L’OMNIUM des LIBERTÉS a mené une enquête auprès des parlementaires et des sénateurs pour connaître leur opinion sur ce qui ressemble à une campagne de délation et de surveillance SANS PRÉCÉDENT dans l’histoire de France. À l’affirmation qu’un » long temps de lecture » serait un symptôme suspect, les élus ne voient pas d’objection et approuvent les critères retenus par l’AFDI.
L’OMNIUM des LIBERTÉS leur a donc clairement demandé s’il était légal de dénoncer un parent ou un voisin parce qu’il a » changé de régime alimentaire ou qu’il fait de la méditation « .
Aucun sénateur ni député n’a manifesté de doute à ce sujet, et l’OMNIUM a reçu des réponses de l’Assemblée Nationale affirmant que la délation était parfaitement justifiée.
Santé pratique No 35, 27 mars 1999
Extraits et résumés Agence SUMFR, 40, rue du Paradis, 76530 GRAND-COURONNE Tél. 02 3567 55 62 – Fax 02 35 69 11 04, France